La parole aux enseignants

La réforme 2025... en clair ! Entretien avec Camille Jullien

✒ Par Audrey Adida

La rentrée 2025 s’annonce chargée avec une nouvelle réforme qui s’applique de la primaire au lycée : français, mathématiques et langues vivantes sont concernés, avec le cycle 3 au premier plan. Vous nous avez partagé vos interrogations et inquiétudes vis-à-vis de ces changements : le manque de lisibilité des différentes mesures qui se succèdent, les difficultés liées à la mise en place des groupes de besoin, les financements insuffisants, et, bien sûr, le temps qui manque cruellement pour se former et aborder sereinement les changements à appliquer dans les classes.

Camille Jullien (@chatdecole), qui donne fréquemment des formations autour de cette réforme, nous propose son regard d’experte pour nous aider à faire le point et à y voir plus clair !

Entretien

Vous avez fait, dans le cadre de votre mission de conseillère pédagogique, un énorme travail de comparaison des anciens et des nouveaux programmes, disponible sur votre blog. Pouvez-vous nous donner quelques points essentiels de ces nouveaux programmes, cycle par cycle ?

Camille Jullien – À mes yeux, le changement majeur apporté par les nouveaux programmes réside dans la place accordée au vocabulaire. Ce qui n’était auparavant qu’un sous-domaine intégré à l’étude de la langue devient désormais une compétence à part entière, construite de manière progressive du cycle 1 au cycle 3. L’introduction de la notion de corpus de vocabulaire marque un véritable tournant. Les programmes insistent sur l’enrichissement lexical à travers des corpus sémantiques (réseaux de sens) et morphologiques (familles de mots, dérivations), ainsi que sur un travail structuré, régulier et réactivé, notamment dans les situations de production d’écrits.

En mathématiques, les évolutions sont également notables. Certaines notions sont introduites plus tôt, comme les fractions et les nombres décimaux dès le CE1, et l’étude des nombres suit un rythme plus soutenu sur l’ensemble du cycle 2. Au cycle 3, l’apparition des probabilités dans les attendus a d’ailleurs suscité de nombreuses interrogations chez les enseignants.

Un autre point qui mérite d’être clarifié est la référence à l’enseignement explicite, désormais présente dans les programmes des cycles 1 et 2. Le terme est souvent source de confusion. On l’associe parfois à l’instruction directe, une démarche bien structurée décrite par Steve Bissonnette, qui repose sur une modélisation initiale plutôt que sur une phase de recherche. Mais dans d’autres cas, on parle d’enseignement explicite au sens large, comme l’entend Roland Goigoux, c’est-à-dire l’ensemble des gestes professionnels visant à rendre les apprentissages clairs : explicitation des objectifs, verbalisation des stratégies, critères de réussite, feedback, bilans intermédiaires… Les programmes jouent parfois sur cette ambiguïté.

Ainsi, le mot « explicite » peut aussi bien désigner une modélisation en amont (par exemple pour les correspondances graphèmes-phonèmes en CP) que les gestes professionnels de l’enseignant dans une approche inductive (comme en grammaire au cycle 2, où l'on recommande de passer par des phases de manipulation, d’observation et de tri avant la formalisation).

 

Il y a ce qui change… mais aussi ce qui ne change pas ! Quelles notions importantes restent en vigueur ?

C.J. – Beaucoup de choses ne changent pas fondamentalement dans ces nouveaux programmes — et c’est loin d’être un hasard. La première raison, c’est qu’ils s’appuient largement sur les guides Eduscol publiés depuis 2018, qui avaient déjà structuré les formations, influencé les méthodes et nourri les pratiques de classe. Ce que font les programmes, c’est entériner officiellement ces principes en les intégrant au texte prescriptif. Il ne s’agit donc pas d’un changement de cap, mais plutôt d’une confirmation des évolutions déjà engagées depuis plusieurs années.

Par ailleurs, les programmes font preuve d’une grande stabilité, en particulier en mathématiques. Mis à part quelques ajustements notables (comme l’introduction des fractions dès le CE1 ou des probabilités au cycle 3), l’essentiel du contenu reste inchangé par rapport à 2020. On retrouve les mêmes attendus, les mêmes repères, dans une continuité rassurante pour les enseignants.

En français, là encore, de nombreux repères sont reconduits à l’identique. C’est le cas par exemple de la place des écrits tâtonnés ou de la dictée à l’adulte en maternelle, ou encore de l’entrée graphémique en CP et du rythme d’enseignement des correspondances graphèmes-phonèmes, déjà détaillés dans les guides. Ces éléments ne sont pas nouveaux, mais ils sont désormais explicitement mentionnés dans les programmes, ce qui leur donne davantage de légitimité.

En somme, ces nouveaux programmes ne rompent pas avec les pratiques en place : ils les confirment, les affinent parfois, et les inscrivent dans un cadre plus clair, plus cohérent, et plus opérationnel.

 

Quel est le calendrier de cette réforme ? Comment va-t-elle se mettre en place sur les prochaines années ?

C.J. – Aux cycles 1, 2 et 3, les programmes de français et de mathématiques entreront en vigueur à la rentrée 2025. En CM2, toutefois, ces programmes ne s’appliqueront qu’à partir de 2026.

En EMC, les programmes ont une mise en application dans le temps : CP, CM1 et 5e en 2024, CE1, CM2 et 4e en 2025 et CE2, 6e et 3en 2026.

C’est le cas également des programmes en langues vivantes au collège, qui s’appliqueront pour les classes de 6e en 2025, puis en 2026 pour les 5e,  en 2027 pour les 4e et en 2028 pour les 3e.

Le programme EVARS (éducation à la vie affective et relationnelle et à la sexualité) entre en vigueur dès la rentrée 2025 pour tous les niveaux.

Enfin, des projets de programmes concernant les autres disciplines commencent à paraitre : c’est le cas de celui du cycle 1 par exemple.

 

« Points de vigilance », « Exemple de réussite » : le cadrage extrêmement précis des compétences à acquérir peut sembler inadapté à la diversité des élèves et de leur progression. Quid de la mise en œuvre d’une pédagogie différenciée ? Comment utiliser sereinement ces repères tout en conservant sa liberté pédagogique, indispensable pour s’adapter à la réalité de sa classe ?

C.J. – Les exemples de réussite sont donnés à titre indicatif. Ils représentent une « ambition collective » à avoir pour le groupe classe, mais tout à fait modulables à l’échelle des individualités et des besoins de chacun. Ils ne représentent pas une fin en soi, mais peuvent aider l’enseignant à construire son évaluation par rapport à l’objectif initial et à se représenter les attendus à ce niveau de classe.

L’écriture de ces programmes laisse à penser qu’ils ont avant tout été conçus pour des enseignants entrants dans le métier, notamment à travers ces points de vigilance. Ces derniers apportent un cadre précis et structurant, qui peut être rassurant pour bon nombre d’enseignants. Certains points sont souvent déjà largement pratiqués dans les classes, comme le fait d’avoir un langage précis et de bien articulé en maternelle, mais jusqu’à présent, ce n’était pas écrit noir sur blanc dans le prescrit.

En somme, ces nouveaux repères ne doivent pas être perçus comme un carcan, mais plutôt comme des outils à mobiliser avec discernement, dans le respect de la liberté pédagogique des enseignants. Cette liberté reste indispensable pour mettre en œuvre une pédagogie différenciée, pensée à partir des besoins réels des élèves et des dynamiques propres à chaque classe.

 

Beaucoup d’enseignants pointent la question des budgets : où trouver les fonds pour investir dans du matériel pédagogique ? Certes, le ministère de l’Éducation nationale a voté une enveloppe budgétaire dédiée à l’achat de manuels scolaires en classe de 6e, mais qu’en est-il du primaire ?

C.J. – En ce qui concerne le primaire, il n’y a pas d’inquiétude à avoir. La mise en œuvre concrète et effective de ces programmes ne pourra pas se faire en une seule année scolaire. Chacun en a pleinement conscience.

De plus, un grand nombre de méthodes déjà présentes dans les classes répondent d’ores et déjà aux demandes institutionnelles de ces nouveaux programmes pour la raison citée plus tôt : les éditeurs et les auteurs d’outils pédagogiques s’appuient sur les guides EDUSCOL, et les nouveaux programmes en sont des synthèses.

Cela dit, si une méthode s’avère vraiment obsolète ou trop éloignée des orientations actuelles, il est tout à fait possible de solliciter un budget exceptionnel auprès de la commune, notamment pour l’achat de nouveaux manuels. Ce type de demande est d’autant plus justifié qu’il s’agit d’accompagner une évolution institutionnelle.

Enfin, on peut aussi envisager des solutions transitoires : mutualisation entre classes ou utilisation de ressources numériques mises à disposition par les éditeurs ou institutions, en attendant un renouvellement plus large du matériel.

 

Quels sont les outils d’accompagnement proposés aux enseignants ? Formations, webinaires, interlocuteurs… Où et à qui s’adresser pour se faire accompagner ?

C.J. – Dans les écoles publiques, les interlocuteurs privilégiés sont les formateurs de circonscription. Tous ont été spécifiquement formés à ces nouveaux programmes, notamment dans le cadre des Plans nationaux en mathématiques et en français. Leur mission est justement d’accompagner les équipes dans la mise en œuvre des attendus institutionnels, en tenant compte du contexte de chaque école.

Par ailleurs, les sites académiques, départementaux ou même de circonscription commencent à proposer des ressources fiables et actualisées : synthèses des programmes, documents d’aide à la programmation, repères de progression, etc.

Ces documents sont pensés pour soutenir le travail collectif et favoriser une appropriation sereine des nouveaux textes.

On trouve également sur Internet une multitude de ressources proposées par des enseignants, notamment via des blogs ou des réseaux sociaux. C’est une richesse, mais je me permets ici un petit rappel de prudence : tout ce que l’on trouve en ligne n’est pas forcément rigoureux ni conforme aux prescriptions officielles. Il peut y avoir des erreurs d’interprétation, des oublis, ou tout simplement des maladresses. Il est donc important de toujours croiser les sources et, si possible, de valider ces contenus avec un formateur ou un conseiller pédagogique.

 

Pour les enseignants qui pourront acquérir de nouveaux manuels, quels conseils donneriez-vous pour se repérer dans la jungle des nouveautés ? Comment analyser un manuel pour choisir le matériel le plus adapté à son contexte d’enseignement ?

C.J. – Pour le primaire, nous avons réalisé dans mon pôle de formation des checklists synthétiques, en français et en mathématiques, qui reprennent les éléments essentiels des nouveaux programmes (NDLR : elles sont disponibles en téléchargement ici : https://www.chatdecole.site/analyser-et-choisir-sa-methode-de-francais/). Ces grilles permettent aux équipes de vérifier si une méthode ou un manuel est bien en phase avec les attendus officiels.

Cela dit, cocher toutes les cases ne suffit pas. Un bon manuel est aussi celui qui correspond au contexte spécifique de l’école et à la pratique de l’enseignant. Il faut pouvoir se projeter dans son usage quotidien, s’approprier les démarches proposées, et surtout se sentir à l’aise avec l’outil, sans quoi il restera difficile à exploiter pleinement.

Je conseillerais donc de croiser deux types d’analyse :

  • une lecture technique, à partir des grilles de repérage ou des référentiels disponibles (dont ceux proposés dans les formations ou sur les sites académiques) ;
  • une lecture plus personnelle et pragmatique : Est-ce que je m’y retrouve ? Est-ce que je vois comment adapter ce manuel à mes élèves ? Est-ce que l’organisation me facilite le travail ?

Enfin, lorsque c’est possible, échanger avec d’autres collègues ayant testé le manuel en question est toujours précieux. Rien ne vaut le retour d’expérience concret, surtout dans un contexte de forte offre éditoriale.

 

Vous êtes également autrice de manuels. Racontez-nous un peu l’envers du décor… Que se passe-t-il quand des nouveaux programmes sont publiés avec un calendrier d’application aussi serré ? Comment sont-ils reflétés dans les manuels ?

C.J. – En tant qu’autrice, j’ai commencé à travailler dès la publication des projets de programme. Bien sûr, à ce stade, on reste très prudents, car ce ne sont pas encore les textes définitifs. Mais les grandes orientations sont déjà là, et elles permettent de détecter les lignes directrices qui vont structurer l’enseignement pour les années à venir.

Lorsqu’un calendrier de mise en œuvre est aussi serré, tout s’accélère : les éditeurs et les auteurs doivent rapidement analyser l’existant, identifier ce qui peut être conservé, ce qui doit évoluer, et mesurer l’impact concret de ces changements sur une méthode complète. C’est un travail à la fois pédagogique, éditorial et logistique, car chaque ajustement dans les programmes peut entraîner des réécritures, des réorganisations, ou même la création de nouveaux supports.

L’enjeu est de rester fidèle aux textes, tout en produisant un outil clair, cohérent, et réellement praticable pour les enseignants sur le terrain. Et cela demande, dans un temps très court, une coordination étroite entre auteurs, éditeurs, formateurs et enseignants de terrain, pour que les manuels soient prêts à temps et réellement utiles.
 

Les questions de la communauté

Quelle est la place de littérature dans les nouveaux programmes ? Comment l’utiliser comme support de l’entraînement à la compréhension écrite ? Et la « lecture plaisir », dans tout ça ?

Louise Loquet (professeure de lettres à Bordeaux – 33 ) : 

« J’aimerais bien savoir quelle est la part des lectures intégrales ou de la lecture plaisir dans un programme où on doit faire 2h de grammaire par semaine, 45 minutes de vocabulaire, de la fluence et de l'écriture aussi… »

C.J. – Dans les nouveaux programmes, la littérature remplit plusieurs fonctions complémentaires. Elle est d’abord un support structurant pour la compréhension écrite : les textes littéraires permettent de travailler des compétences comme les inférences, le repérage d’informations, l’interprétation ou encore l’enrichissement du vocabulaire. Les programmes insistent sur l’articulation entre lecture, écriture et oral, pour stabiliser les apprentissages.

Les lectures intégrales restent pleinement valorisées. Elles sont indispensables pour développer une culture littéraire commune, suivre une progression narrative, et donner du sens aux activités de compréhension et de production d’écrits.

Quant à la lecture plaisir, elle n’apparaît pas comme une activité isolée, mais elle est présente en filigrane : temps de lecture libre, bibliothèques de classe, échanges autour des livres, etc. Autant de pratiques à encourager pour entretenir le goût de lire.

Le défi, avec un emploi du temps très cadré, c’est d’articuler efficacement ces dimensions. Mais les textes eux-mêmes posent un cadre clair : la littérature n’est pas un supplément, c’est un levier d’apprentissage essentiel, au service des compétences de compréhension, d’expression et du plaisir de lire.

 

Comment gérer l’application échelonnée des programmes, notamment dans les classes à double niveau, quand un niveau applique un programme et pas l’autre ?

Muriel André (enseignante de primaire à Saint-Chamas - 13) :

«  Les programmes doivent être mis en place dès la rentrée 2025 (sauf pour les CM2) mais, comme il n'y a pas d'échelonnement de cette mise en place, cela va poser de sacrés problèmes. Par exemple, pour les fractions, les élèves sont censés les avoir abordés dès le CE1 mais pour la cohorte de CM1 de l'année prochaine ce ne sera pas le cas... Du coup, il va falloir faire la partie CE1, celle de CE2 et celle de CM1 en CM1 l'année prochaine. Cela me semble très compliqué ! »

Clément Mucciante (professeur au Lycée Couteaux – 59) :

« Comment fonctionneront les nouveaux programmes en 1ère et Tle lorsque dans certains établissements les deux niveaux sont regroupés ? Puisque les axes seront différents désormais. »

C.J.– Dans cette situation, le bon sens doit primer. Comme je le disais précédemment, les changements liés à une modification de programme ne se font jamais du jour au lendemain : ils s’inscrivent forcément dans une transition qui prend plusieurs années.

Concrètement, on part toujours des compétences réelles des élèves, en tenant compte de ce qu’ils ont vu dans les niveaux précédents, même si cela ne correspond pas exactement à la nouvelle programmation.

Par ailleurs, la plupart des méthodes actuelles, en français comme en mathématiques, intègrent désormais des ressources différenciées, conçues précisément pour gérer l’hétérogénéité et les progressions à plusieurs vitesses. Ces outils permettront d’accompagner la bascule progressive vers les nouveaux programmes, sans créer de rupture ni mettre en difficulté les élèves.

 

En maternelle, le livret de progrès est-il remis en cause ?

Estelle Sanchez (enseignante à l’École maternelle Louise Michel – 27) : 

« Le livret de progrès tel qu'il existe actuellement en maternelle est -il remis en cause par le cadrage strict des apprentissages des nouveaux programmes ? »

C.J. – Le livret de progrès est toujours préconisé en maternelle. Les items qui le composent pourront être amenés à être revus pour correspondre à 100 % aux nouveaux programmes. Cela dit, il y a peu de changements programmatiques et notionnels au cycle 1. On a davantage une progression qui a évolué sur le cycle, comme le fait de travailler l’écriture cursive dès 5 ans ou encore les boucles dès 4 ans. Mais tout ceci n’apparait normalement pas dans un livret de progrès, qui valorise les acquis des élèves au fur et à mesure du cycle, sans ranger les items dans les années scolaires : PS, MS, GS ou les âges : 3, 4 ou 5 ans.

 

Sur quels outils peut-on s’appuyer pour faire face à la dégradation du niveau des élèves ?

Armelle Mathieu (professeure au Collège Nicolas Fouquet – 77) : 

« Les élèves arrivant en 6e sont nombreux à être en grande difficulté face à la lecture et l'écriture. Ils n'ont pas fini d'apprendre à lire, la graphie n'est pas acquise, l'identification des classes grammaticales non plus... Ils sont regroupés en groupe de besoins par 15 jusqu'à 24. Nous n'avons plus que 4,5 heures de cours. Le besoin en supports et leur progression ne sont pas du tout pris en charge par des manuels classiques. À quand une vraie réflexion sur le niveau réel des élèves qui ne cesse de se dégrader ? Et des exercices que les élèves pourraient faire en autonomie en classe et à la maison ? Le programme est le même pour tous. Mais dans quelles conditions ? »

C.J. – La question soulevée ici est très importante, et elle reflète une préoccupation largement partagée par les enseignants du second degré. Les constats sur les difficultés persistantes en lecture, en écriture ou en grammaire à l’entrée en 6e sont connus et documentés. Il ne s’agit pas d’une remise en cause du travail effectué en amont, mais d’une réalité complexe, liée à des parcours scolaires très hétérogènes et à des contextes d’enseignement parfois fragiles.

Je ne suis pas en position de répondre au nom de l’institution ou d’engager une réforme des programmes ; ce n’est pas mon rôle. En revanche, comme n’importe quel formateur, je peux travailler avec des équipes pour essayer de solutionner du mieux possible certaines situations. Parmi les propositions, il y a l’accent mis sur l’enseignement équitable[1] par exemple. 

 

Peut-on espérer un peu de stabilité après cette réforme ?

Camille Seguy (asei en IME – 31) :

« Je souhaiterais que les réformes aient lieu moins souvent, que les ministres restent plus longtemps en poste pour prendre des décisions avec vue et effets à long terme, une continuité dans les orientations prises et qu'on arrête de vouloir gérer l'éducation publique comme une entreprise productive et soumise à la rentabilité. »

Sylvie Fournel (Enseignante à l’Ecole Primaire du Chêne – 69) :

« Des changements de programme de plus en plus fréquents, on n'a pas le temps de s'approprier les anciens et de voir les effets à long terme qu'il faut déjà travailler les nouveaux. »

Sur la question de la fréquence des réformes, je crois qu’il faut apporter quelques nuances. Tout d’abord, ces programmes ne sont pas une rupture en soi. Ils ne changent pas fondamentalement la façon dont nous faisons classe. Depuis 2018, soit depuis 7 ans, il n’y a pas eu de changements majeurs dans les textes. Et il est plutôt sain que ces textes soient mis à jour et intègrent les résultats des recherches didactiques et pédagogiques qui émergent. Je le dis souvent aux enseignants de ma circonscription : on ne peut pas enseigner sans prendre en compte l’évolution des études en sciences de l’éducation. Comme en médecine ou en physique, nos connaissances progressent, et nos pratiques doivent évoluer en conséquence, pas pour tout bouleverser, mais pour mieux répondre aux besoins des élèves et aux réalités de notre société.

Cela ne veut pas dire qu’il faut remettre tout à plat tous les dix ans, ni jeter ce qui fonctionne. Mais prendre un temps pour réinterroger nos pratiques, nos outils, nos progressions, à la lumière des connaissances disponibles, me semble non seulement raisonnable, mais nécessaire pour faire évoluer l’école avec son temps, sans perdre de vue ce qui reste fondamental.

 

Crédits

Camille Jullien est conseillère pédagogique dans l’académie de Lyon et référente Français. Devenue formatrice après avoir enseigné en cycles 1 et 2, notamment en CP, elle anime un blog et une page Instagram (@chatdecole) où elle partage des ressources et analyses à destination des professeurs des écoles. Elle est également autrice de méthodes pédagogiques de français chez Hachette Éducation.

 

Blog et page Instagram @chatdecole

https://www.chatdecole.site/

https://www.instagram.com/chat_decole/

Vous y trouverez notamment des tableaux synthétiques présentant les nouveaux programmes, par cycle et par matière.

 

Méthodes pédagogiques écrites ou co-écrites par Camille Jullien

Kit et Siam, méthode de lecture au CP

https://www.enseignants.hachette-education.com/video/replay-faq-la-collection-kit-et-siam-du-21-mai-2025/

 

Dyna-mots, méthode de grammaire, orthographe et vocabulaire en CE1 et CE2

https://www.enseignants.hachette-education.com/livres-collections-dyna-mots/

 

Dyna-Voc, méthode autour des corpus de vocabulaire en CE1 et CE2

https://www.enseignants.hachette-education.com/livres-collections-dyna-voc/


 


[1] L’enseignement équitable vise à garantir que tous les élèves, quels que soient leur origine sociale, leur niveau ou leurs besoins, bénéficient des conditions nécessaires pour apprendre et progresser. Cela ne signifie pas traiter chacun de la même manière, mais adapter les pratiques, les attentes et les ressources pour répondre aux besoins spécifiques de chaque élève. L’objectif est de réduire les inégalités scolaires en offrant plus à ceux qui en ont le plus besoin, tout en maintenant des exigences élevées pour tous. C'est un dispositif qui est actuellement testé par le Centre Académique de Ressources pour l'Égalité des Chances (CAREC) de l'académie de Grenoble.

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